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6 janvier 2011

Présidentielles : faut-il être de Droite pour être le candidat de la Gauche?

 

En ce début d'année 2011, la question n'est pas si incongrue qu'elle en a l'air. S'il n'y avait eu que la sortie médiatique de Manuel VALLS sur le prétendu nécessaire « déverrouillage des 35 heures », on aurait pu ne pas la poser ainsi, même si l'outrance est grande.

Evidemment le buzz était le premier objectif recherché, et cela a marché. Comme d'habitude dans ce genre de transgression, cette remarque a aussitôt été replacée par son auteur dans une volonté de montrer sa « compréhension du monde des entreprises », d'en « finir avec les postures », de demeurer « réaliste », comme pour accuser du contraire, par effet de miroir, tous ceux de son camp qui ne s'aligneraient pas sur son opinion. Armés des mêmes manipulations du vocabulaire, ses supporteurs ont expliqué qu'eux aussi voulaient une gauche « moderne », tandis que la Droite la plus libérale, qui n'a cure de Valls mais qui a saisi la balle au bond, l'a tout de suite qualifié de « courageux » ou de « lucide », « parlant un langage de vérité », pour mieux disqualifier les autres ponctuellement stigmatisés de « marxistes » ou d'« idéologues ». La question cependant demeure : est-ce bien compatible de s'affirmer de Gauche et de tenir un tel propos sur un tel sujet?

Quand VALLS se trompe sur toute la ligne, est-ce volontaire?

Autant c'est une nécessité de regarder avec distance, nuance, et regrets si nécessaire le bilan des actions passées, autant cette charge déguisée sur les 35 heures paraît à côté de la plaque sur tous les plans. Premièrement par rapport aux faits : le détricotage des 35 heures est déjà accompli, c'est une constante depuis 2002. Deuxièmement sur le plan électoral : à quoi sert d'évoquer ce thème au moment où le « travailler plus pour gagner plus » de Nicolas SARKOZY fait naufrage? Troisièmement, Manuel VALLS oublie qu'il a fait partie de l'équipe de communication de Lionel JOSPIN à l'instant où celui-ci mettait précisément en œuvre cette réforme, et jusqu'à ce jour il n'avait visiblement jamais rien trouvé à redire. Quatrièmement, VALLS a certes besoin de faire entendre sa petite musique pour se démarquer des autres candidats socialistes potentiels à la présidentielle, mais le faire sur un sujet aussi central pour se mettre dans le strict sillage de la Droite, c'est fracturer son parti et en brouiller un peu plus l'image avant d'avoir soumis en interne le moindre débat sur ce point.

Le plus grave, plus encore pour un homme de Gauche, c'est de faire comme s'il ignorait à la fois les apports indubitables de cette loi, son bilan global et détaillé, et la complexité plus générale du sujet qu'est le temps de travail. Or, les 35 heures ont créé – sans qu'il soit possible de le contester – environ 400000 emplois, au cours d'une législature qui a réduit le chômage de 1,1 million en ajoutant à cette mesure les emplois-jeunes et une fiscalité plus redistributive (prime pour l'emploi, dégrèvement de taxe d'habitation pour les très bas revenus). Entre 1997 et 2002, la politique économique du gouvernement a permis à la France de s'enrichir et de créer des emplois plus vite que ses voisins, alors qu'aujourd'hui on bave d'envie devant la « reprise » allemande, et que les heures supplémentaires défiscalisées sont une véritable incitation au licenciement ou au non-recrutement.

Evidemment, il faut reconnaître que la réduction du temps de travail s'est accompagnée de stagnations salariales, déjà entamées auparavant, que les baisses de charges associées ont été trop fortes pour les grandes entreprises et trop faibles pour compenser les contraintes faites aux petites. Oui, il faut admettre que face au discours catastrophiste de certains patrons et vue la faiblesse du tissu syndical, les négociations et les décrets d'application de la loi ont conduit à accroître l'intensité et la pénibilité du travail. Mais est-ce le principe même des 35 heures qui est ici en cause? Il serait surtout temps d'expliquer que le drame de cette réforme, c'est que malgré son efficacité, elle n'avait d'avenir que croisée avec une redistribution des richesses, ce qui dans une économie ouverte et concurrentielle, aurait nécessité que d'autres pays l'imitent (en Europe notamment) et que le libre-échange ne soit pas aussi absolu avec les pays à bas salaires.

Pour un bilan sans concession mais honnête et hyper-documenté de cette réforme (laquelle portait aussi en elle la perspective indispensable d'un temps supplémentaire pour soi, pour les enfants, pour s'investir dans la cité), je ne saurais que trop conseiller – à Manuel VALLS ? - la lecture de l'excellent ouvrage de Sophie DUFAU, Ces chères 35 heures, paru en 2008.

HOLLANDE et les droits d'entrée à l'Université : le comble !

Manuel VALLS est-il le seul sur cette longueur d'onde maladroite ou « mal à droite » ? Pas certain. Au détour d'un article du Monde daté de demain et d'une recherche internet que sa lecture a suscitée, j'ai pris connaissance d'un des points du « pacte intergénérationnel » que s'apprête à développer François HOLLANDE. Quelle n'a pas été ma – très mauvaise – surprise de voir l'ancien Premier Secrétaire y prendre prétexte d'une vraie anomalie (le financement de l'enseignement supérieur opère une redistribution inverse) pour proposer, même de manière modulée, rien moins qu'une hausse des frais d'entrée à l'Université. Y compris s'il le faut, à payer avec des prêts ! Endetter les jeunes pour qu'ils paient eux-mêmes leur formation, moteur de l'ascenseur social, comme on endette les ménages pour maintenir la consommation et la croissance, ou les Etats pour laisser les particuliers et les entreprises les plus riches payer moins d'impôts ! Elle est de Gauche, cette idée? On croit cauchemarder.

Le plus embêtant est que VALLS et HOLLANDE sont loin d'être isolés sur cette ligne, qui n'a plus grand chose de socialiste ou de social-démocrate, et qui ne les différencie plus en rien de la Droite ou du Centre-Droit. Parmi les candidats aux futures primaires socialistes figure aussi un ancien ministre de l'Industrie, Christian PIERRET, dont la détermination à l'emporter est absolue et qui se revendique lui-même « social-libéral », au moment même où le libéralisme économique montre ses pires travers et démontre de plus en plus nettement son caractère antisocial ! Gérard COLLOMB, le maire de Lyon, est de la même veine. Creusez leurs projets économiques et sociaux, et Pierre MOSCOVICI ou DSK risquent de réserver les mêmes « surprises ». Chez Ségolène ROYAL, le discours reste à Gauche devant les ouvriers maltraités mais les démonstrations détaillées et cohérentes manquent pour ne pas craindre les mêmes dérives. Arnaud MONTEBOURG ne faisant pas de ces sujets le cœur de ses propositions, on le cerne mal. Seule, un peu trop seule, Martine AUBRY semble – lorsqu'elle aborde le fond – être capable de faire le tri tout en gardant le cap. Semble, ai-je dit.

Il va falloir investir les primaires du PS !

Mais à quoi jouent donc ces socialistes droitiers? Certains diront qu'ils cherchent à paraître « crédibles » en abandonnant une partie de leurs idéaux initiaux, prétendument devenus infinançables ou jugés électoralement trop clivants. Sans reprendre les réflexions d'une précédente série d'articles sur les renoncements et les hésitations de la Gauche face au monde actuel, je me contenterai de voir là un moyen de mordre au centre de l'échiquier politique, vu comme la clé d'un scrutin présidentiel dont la finale ne se joue qu'à deux. Et ce, au risque de brouiller les cartes, de perdre les électeurs de Gauche et de ne pas franchir le premier tour.

Toutefois, il y a peut-être une autre raison à cette dérive : les primaires. Ouvertes à tous, elles peuvent théoriquement voir participer à la sélection du candidat de Gauche l'ensemble des électeurs inscrits sur les listes communales, y compris les électeurs de Droite. Ceux-ci seront tentés d'y participer pour se protéger d'un candidat trop à Gauche ou trop rassembleur au sein de la Gauche, et ainsi mieux préparer la réélection de Nicolas SARKOZY, tandis que les électeurs de la gauche hors-PS risquent de faire la fine bouche en prétextant que de toute façon, cette famille socialiste n'est pas ou plus la leur.

Le calcul de VALLS peut s'inspirer d'un tel scénario : en rassurant la Droite il compte la mobiliser et ratisser large pour gagner les primaires si DSK reste au FMI, et espère ensuite que des Français rassasiés de sarkozysme le choisiront, même si c'est par défaut ou sans grand enthousiasme pour les forces les plus progressistes. Dérive libérale flagrante, renoncement à faire gagner des idées en se calquant sur un état prétendu de l'opinion qu'on ne cherche plus à modifier, ou encore stratégie pure mais risquée ; peu importe finalement. Dans un tel contexte, ce qu'il faut pour nous, femmes et hommes de Gauche, c'est participer aux primaires pour éviter les pires !

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Commentaires
S
Faut-il enterrer les 35h ?<br /> http://www.dailymotion.com/video/xgnnid_les-controverses-du-progres-manuel-valls-pierre-larrouturou_news<br /> <br /> + aujourd'hui à grenoble<br /> http://www.eelv.fr/6020-lutter-radicalement-contre-le-chomage-et-contre-la-precarite/
S
D'après le livre de Larrouturou "Crise, la solution interdite" page98 et suivantes si vous avez lu son bouquin, ces chiffres ne sont pas les bons car même si ce n'est agréable à entendre : la gauche et le PS a elle aussi modifié le compte des chômeurs... (tu m'étonnes que ce discours devait mal passer au PS...)<br /> Pour lui sur les 1 million de chômeurs :<br /> - 375000 chômeurs en plus dans les catégories "invisibles"<br /> - 88 000 dispensés de recherche d'emploi supplémentaires<br /> - 100 000 RMIstes en plus dont 50 ou 60 000 qui ne sont pas dans les chiffres de l'ANPE<br /> donc en réalité le chômage aurait pour lui diminuer de non pas 1 million mais 500 000... dont 273 000 emploi jeunes et 330 000 grâce aux 35heures... et donc malgré la croissance assez forte à l'époque, selon lui, sans les emplois jeunes et les 35h, le chômage n'aurait donc pas diminué...<br /> <br /> On peut ne pas être d'accord mais ça se tient comme discours quand on défend que la réduction du temps de travail est le moyen le plus efficace pour faire baisser le nombre de chômeurs...
S
http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/01/06/non-il-n-est-pas-vrai-qu-on-travaille-moins-en-france-qu-ailleurs_1461843_3232.html
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